oui, nous le disons tranquillement, il était gay, homosexuel si vous voulez. L'Histoire française fourmille pétille d'homos glorieux...restés (même après leur mort) au placard
Le pacificateur
du Maroc a eu droit à une inscription en arabe sur son sarcophage de granit. On rêve ! Lui, l'ami de Proust et de Cocteau se faisait-il prendre par des goumiers de
son service, par son ordonnance? son secrétaire ou autre ? Honneur à lui, notre frère !
Lyautey à Ankazobé (Madagascar), 1897-1898 Photo vintage
Devenu une légende vivante, pour son œuvre dans le Maroc colonial, Lyautey (1854-1934), avait 58 ans d'une histoire militaire française avant cet
épisode. Un passé et une carrière presque traditionnels. Pourquoi s'est-il distingué jusqu'à devenir cette figure épique de la France impériale ?
Louis Hubert Gonzalve Lyautey est né le 17 novembre 1854 à Nancy dans une famille aux origines aristocratiques, comptant des militaires de haut
rang. En mai 1856, il fait une chute du balcon familial, place Stanislas [ci-contre], en regardant passer le cortège de baptême du Prince impérial,
fils de Napoléon III. Il tombe d'un étage, traverse le store d'un magasin puis cogne le plastron providentiel d'un cuirassier à cheval. Sa survie miraculeuse condamne cependant le petit enfant à
une opération pour des douleurs lombaires suivi d'un alitement qui dura deux ans. Le jeune garçon est contraint aux béquilles et même au port fréquent d'un corset orthopédique jusqu'à l'âge de
douze ans. Cette expérience forgea son caractère et l'inaction forcée le mit au contact de la lecture, des rêveries et d'un entourage féminin. Alternant une scolarité au lycée avec l'instruction
donnée par un répétiteur à la maison, Lyautey devient bachelier en 1872. Puis, sous la direction des jésuites de l'école Sainte-Geneviève, il prépare simultanément l'entrée à l'École
Polytechnique et à Saint-Cyr qu'il intègre en 1873 à l'âge de dix-huit ans.
En 1874, il fait la connaissance du capitaine Albert de Mun, monarchiste attentif au sort des ouvriers et apôtre d'un "catholicisme social" qui
influença durablement Lyautey. Celui-ci est nommé sous-lieutenant à sa sortie de Saint-Cyr en 1875, et accède à l'école d'application d'état-major dans une promotion d'une vingtaine de jeunes
officiers. Il en sort avec le grade de lieutenant à la fin décembre 1877 et décide de consacrer une permission de deux mois à un périple en Algérie. La terre africaine, sa lumière, le lyrisme de
ses paysages et de ses couleurs, l'ivresse de ses parfums saisissent immédiatement le jeune Lorrain. Ce voyage donne corps aux visions rêveuses de son enfance.
Cela me rappelle « « « « »
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Officier de cavalerie, Lyautey retrouve l'Algérie à l'été 1880 pour deux ans : Orléansville,
Alger puis le sud algérien. En garnison à Teniet El-Haad, il affronte la solitude désertique et médite sur sa foi. «Il faut imaginer, ce lieutenant de vingt-cinq ans, seul en plein bled avec
quelques soldats, et qui étendu sur un divan, couvre un papier arabe de tableaux synoptiques de saint Marc et de saint Luc. Le résulta de ses travaux l'effraya. Il éprouva un grand trouble. Il
était seul. Il ne pouvait consulter personne. Il fit venir des livres de Renan, qui l'intéressèrent mais ne le touchèrent pas. Il cessa de pratiquer avec exactitude.» (André Maurois). En décembre
1882, il doit rentrer en métropole, dans les Vosges… puis à Saint-Germain-en-Laye en 1887 où il reçoit le commandement du 1er escadron du 4e régiment de chasseurs à cheval. C'est de cette époque
que datent ses réflexions sur la mission de l'officier.
Le 15 mars 1891, la Revue des Deux Mondes publie son article : "Du rôle social de l'officier dans le service militaire universel". Les commandements
de cavalerie se succèdent : Gray (Haute-Saône) puis Meaux (Seine-et-Marne). En 1894, le commandant Lyautey, âgé de quarante ans, est affecté en Indochine. Jusque-là, en vingt ans de carrière
militaire, et à l'exception de ses deux années algériennes, il n'a connu que les garnisons de métropole, le temps de paix et jamais le combat.
Au Tonkin, il seconde le colonel Gallieni à la frontière chinoise et essuie son premier feu de guerre à Ké-Tuong en avril 1895. Il participe à l'administration de la région occupée et accède aux fonctions politiques en tant que directeur du cabinet militaire de Rousseau,
gouverneur général de l'Indochine. En mars 1897, Lyautey rejoint Gallieni à Madagascar insurgée où il reçoit le commandement d'une région hostile à la nouvelle autorité française. Il fixe son
quartier général à Ankazobé [photo ci-contre].
Pendant plus d'un mois, Lyautey poursuit les rebelles : la tactique des colonnes convergentes, apprise auprès de Gallieni, fait son succès. Au lieu
de déporter le chef vaincu, il le réintègre dans ses fonctions mais sous l'autorité française, pratiquant ainsi cette politique "d'alliance" qu'il affectionna par la suite. "Montrer sa force pour
ne pas avoir à l'utiliser", disait-il.
En septembre 1897, Lyautey obtient le grade de lieutenant-colonel. Son expérience d'administrateur, de "civilisateur" à la Gallieni, s'étend avec
l'aménagement et "l'œuvre de résurrection" qu'il impulse dans tout le nord-ouest de l'île. Pour ce militaire, c'est la mise en valeur qui justifie la colonisation. Lors d'un séjour en métropole
de 1899 à 1900, il sollicite des soutiens pour son action. Son discours à l'Union Coloniale est publié par la Revue des Deux Mondes sous le titre "Du rôle colonial de l'armée". Rentré à Madagascar, et basé à Fianarantsoa de 1900 à 1902 [photo : maison de Lyautey à Madagascar], Lyautey exerce l'autorité française sur un
million de personnes et sur un territoire représentant le tiers de cette grande île…!
Rentré à Paris en juin 1902, il est mal à l'aise face aux conséquences de l'affaire Dreyfus (alors qu'il n'a jamais été anti-dreyfusard), et face à
l'offensive anti-cléricale de la gauche radicale-socialiste. Il reçoit, sans enthousiasme, le commandement du 14e hussards établi à Alençon dans l'Orne. L'horizon provincial l'ennuie
profondément. Heureusement, à la suite d'une rencontre avec Charles Jonnart, gouverneur de l'Algérie, son sort renoue avec l'Afrique. Lyautey est nommé commandant de la subdivision d'Aïn Sefra
dans le sud de l'Algérie en même temps qu'il devient général. Il doit pacifier les confins frontaliers avec le Maroc. C'est lui qui, après la mort d'Isabelle Eberhardt, fit rechercher par ses
soldats ses écrits emportés par la boue. À la fin de l'année 1906, Lyautey commande la division d'Oran et doit occuper Oujda en 1907 en riposte à l’assassinat du docteur Mauchamps à
Casablanca.
Lyautey à Oujda en 1907
Les événements le poussent toujours plus dans les affaires marocaines : intervention contre le soulèvement des Beni-Snassen (novembre 1907) et
charge de haut-commissaire pour la zone marocaine occupée à Oujda. Il parvient à convaincre Clemenceau, au départ hostile, de la justesse de sa politique au Maroc. En 1910, cependant, le général
est nommé à la tête du Xe corps d'armée à Rennes jusqu'au début de 1912.
Quand la convention de Fès (mars 1912) établit le protectorat français sur le Maroc, Lyautey
est tout désigné pour en être le premier Résident général. Instruit par ses séjours indochinois et malgache, ainsi que par l'expérience des bureaux arabes en Algérie (1833-1870), il refuse la
politique d'assimilation et d'administration directe. [photo : Lyautey en 1912]
Il s'engage dans la recherche d'une collaboration avec les élites civiles et religieuses : restauration de l'autorité du makhzen (gouvernement
central) avec un nouveau sultan, Moulay Youssef (1912-1927). Les colons ne peuvent procéder à la dépossession foncière comme cela avait été en Algérie. La justice, l'enseignement, l'artisanat,
sont protégés par la "politique indigène" du protectorat. Admirateur des valeurs et du patrimoine marocain, Lyautey a pratiqué une "politique des égards", déférente à l'égard de l'Islam. Après la
"pacification", il impulsa une modernisation de ce vieux pays : infrastructures, développement urbain (Rabat, port de Casablanca). Au sommet de sa gloire, il est élu à l'Académie française en
novembre 1912. Appelé par Briand au ministère de la Guerre en décembre 1916, il se sent manipulé par celui-ci et sans prise sur les événements. En avril 1917, il démissionne et retourne au
Maroc.
Il avait dit, lors de son premier mandat de Résident général : "Je n'ai tenu le Maroc que par ma politique musulmane" et son bilan plaide en sa
faveur. En 1920, il défend ses options et demande une politique de ménagement à l'égard de la Turquie. En 1921, il reçoit la dignité de maréchal de France. Le 19 novembre 1922, il préside la
cérémonie d'ouverture des travaux de la Mosquée de Paris. Épuisé par la tâche, Lyautey doit subir des opérations chirurgicales à Paris. C'est le moment de la guerre du Rif déclenchée dans le nord
du Maroc par Abd el-Krim. En désaccord avec les dirigeants du Cartel des Gauches, il se retire en 1925. Ses adversaires - colons du Maroc et de l'Algérie – sont satisfaits car il lui reprochaient
sa politique "indigène". Lyautey vit désormais dans sa propriété de Thorey en Lorraine.
En 1931, il préside l'Exposition coloniale au bois de Vincennes. Lyautey meurt le 27 juillet 1934 après quelques heures d'agonie. L'année suivante,
sa dépouille est transportée à Rabat dans le mausolée (une blanche kouba) où il avait souhaité reposer. Mais le 21 avril 1961, les cendres du maréchal sont ramenées en France et placées par le
général De Gaulle aux Invalides le 17 mai.
mausolée du maréchal Lyautey à Rabat
Michel Renard (janvier 2006)
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