Couples homosexuels en Tunisie : "Si on dit 'non je ne suis pas homo' ils vont appliquer le test anal, c'est horrible"
Thierry et Yoan, l'un des deux couples bi-nationaux ayant fui la Tunisie éviter d'être arrêtés. (DAMIEN TRIOMPHE/RADIO FRANCE)
Deux couples homosexuels franco-tunisien et franco-mauricien ont dû fuir la Tunisie, pour se réfugier à La Rochelle. Ils redoutaient d'être arrêtés et emprisonnés en raison de leur orientation sexuelle. Il ne fait visiblement pas bon d'être homosexuel en Tunisie ces jours-ci. Christophe et Mehdi d'un côté, Thierry et Yoan de l'autre, sont deux couples homosexuels, binationaux, Français et Mauricien pour l'un, Français et Tunisien pour l'autre. Ils tenaient un hôtel à Carthage au nord de Tunis, où les deux amis français s'étaient installés il y a 4 ans. Ils ont dû fuir la Tunisie il y a quelques mois parce qu'ils étaient sur le point de se faire arrêter pour leur homosexualité, rapporté lundi 19 février.
Une enquête sur dénonciation
En octobre 2017, à Tunis, le consulat de France convoque Thierry. Le service juridique lui annonce qu'ils sont menacés, lui et son compagnon Yoan, mais aussi Christophe et Mehdi : "On allait être arrêtés très vite. Il fallait fuir la Tunisie très rapidement, pour éviter les arrestations de nuit parce qu'ils voulaient nous prendre sur le fait, en flagrant délit."
Les couples apprennent qu'ils sont sur écoute depuis six mois, le temps de l'enquête pour prouver leur homosexualité. Christophe explique que "la Tunisie a mené cette enquête sur une dénonciation. Le consulat a confirmé qu'il y avait eu une dénonciation."
L'enquête est longue parce que les couples sont discrets. Ils ne sont par exemple jamais sortis main dans la main ou au restaurant, confie l'un d'eux. "Non, on a toujours fait très attention, parce qu'il ne faut pas choquer la population. C'est quand même un pays où il y a des règles à respecter. On est étrangers."
Jusqu'à 3 ans de prison ferme encourus
La loi tunisienne est très intransigeante vis-à-vis des homosexuels. L'article 230 prévoit jusqu'à trois ans de prison ferme pour des actes homosexuels. Mehdi est le mari de Christophe. Étant Tunisien, il risquait un traitement plus dur, une "humiliation totale", explique-t-il. "Si on dit 'non je ne suis pas homo' juste pour se protéger, ils vont appliquer le test anal et c'est horrible. C'est-à-dire qu'on dirait qu'on se fait violer. La police va faire exprès de publier ça. À tes proches, à ta famille juste pour t'humilier." Mehdi est d'ailleurs inquiet pour sa famille restée sur place, qui pourrait subir des pressions.
Les couples ont donc fui en laissant tout derrière eux. Ils ont gagné la France par bateau. Ils sont allés à La Rochelle, dans la famille de Christophe, originaire de la commune. Selon eux, la France n'a rien fait, et ne fait rien pour les aider. Leurs compagnons souhaitent obtenir des papiers pour pouvoir travailler en France [comme les couples sont mariés, les conjoints ne sont pas expulsables]. Sur place, les couples expliquent que, depuis la chute de Ben Ali, les autorités tunisiennes organisent une véritable chasse aux homosexuels.
A l'heure où on se soucie de protéger les animaux, qu'en est-il des HOMOS ?
VIDEO. "Ils m'ont examiné comme si j'étais un animal" : en Tunisie, des "tests de la honte" pour "identifier" les homosexuels
En Tunisie, 70 personnes ont été condamnées en 2017 à de la prison ferme à cause de leur homosexualité. Pour les identifier, la police utilise des tests anaux, sans aucune validité scientifique.
On voit que la personne est efféminée, on l’amène au poste, on l’interroge, on l’oblige à donner le mot de passe de son téléphone.
Mounir Baatour
L’homosexualité, entre tabou et délit
En Tunisie, 70 personnes ont été condamnées en 2017 à de la prison ferme à cause de leur homosexualité. Le président de Shams explique les interpellations arbitraires de la police tunisienne : "On voit que la personne est efféminée, on l’amène au poste, on l’interroge, on l’oblige à donner le mot de passe de son téléphone."
En cas de suspicion d’homosexualité, la police procède à un test anal pour s’en assurer. Une méthode qui n’a aucune validité scientifique. Dans une vidéo diffusée par Human Rights Watch, un Tunisien témoigne, bouleversé : "Ça ne devrait pas exister. Ils m’ont examiné comme si j’étais un animal."
L’Association tunisienne de défense des libers individuelles (Adli) qualifie cet examen de viol. Son président, Wahid Ferchichi, se bat farouchement pour "immédiatement mettre un terme au test de la honte". En septembre 2017, la Tunisie s'est engagée à ne plus imposer de tests anaux, sans dire quand cette promesse entrerait en vigueur. En attendant, les tests anaux continuent.
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Chouf-Chouf.com 10 fevrier 2018la décision de supprimer les tests anaux n'a jamais ét appliquée
En Tunisie, la justice impose encore des tests anaux aux hommes pour « identifier » les homosexuels. En 2017, 70 personnes ont été condamnées pour homosexualité dans ce pays. En cas de doute sur l’homosexualité d’un « prévenu », la police procède à un test anal pour vérifier. Cette méthode, bien entendu, n’a aucune validité scientifique.
Pour les associations de défense des droits de l’homme, cette pratique honteuse est assimilable à un viol. Dans une vidéo diffusée par l’ONG Human Rights Watch, un Tunisien témoigne, bouleversé : « Ça ne devrait pas exister. Ils m’ont examiné comme si j’étais un animal. »
En avril 2017, l’Ordre des médecins tunisiens a à son tour condamner ces tests et dénoncé une atteinte à la dignité humaine. « L’Ordre des médecins, en tant que garant du respect de la déontologie médicale, condamne ainsi fermement tout examen médical non justifié et/ou touchant à la dignité et à l’intégrité physique ou mentale de la personne examinée. Il considère la pratique d’un examen génital ou anal pour vérifier ou confirmer la nature des pratiques sexuelles d’une personne sans son consentement libre et éclairé, comme une atteinte à sa dignité et appelle les médecins réquisitionnés à informer les personnes qu’ils ont à examiner, de leur droit de refuser un tel examen », déclarait l’ordre dans un communiqué.
La Tunisie, comme les deux autres pays du Maghreb, pénalise l’homosexualité. L’article 230 du Code pénal tunisien criminalise la sodomie et le lesbianisme, punis de trois ans de prison. Au Maroc, l’article 489 du Code pénal punit « les actes licencieux ou contre nature avec un individu du même sexe » de peine d’emprisonnement allant de 6 mois à 3 ans d’une amende de 120 à 1 200 dirhams. En Algérie, les articles 333 et 338 du Code pénal stipulent que « tout coupable d’un acte d’homosexualité est puni d’un emprisonnement de deux mois à deux ans et d’une amende de 500 à 2 000 dinars. Si l’un des auteurs est mineur de 18 ans, la peine à l’égard du majeur peut être élevée jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 10 000 dinars d’amende ».
En septembre 2017, la Tunisie s’est engagée à ne plus imposer de tests anaux, sans toutefois fixer de calendrier (voir la vidéo ci-dessus). Pout le moment, les tests de la honte sont toujours effectués…
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