Partager l'article ! loi sur la prostitution : au moins il y en a qui réagissent: vous constaterez que le nombre des indignés tend vers le nul !!! ...
vous constaterez que le nombre des indignés tend vers le nul !!!
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Sur AgoraVox :
La proposition de loi relative à la lutte contre le système prostitutionnel arrive en fin de parcours législatif. Enfin ! pourrait-on dire. Car il aura fallu plus de deux ans, depuis son premier examen à l'assemblée nationale, pour qu'elle soit soumise à un ultime vote. Étonnant, alors que la cause défendue aurait dû faire consensus. Pourquoi tant d'avis divergents, notamment sur sa disposition principale, la pénalisation du client ?
La proposition de loi sur la prostitution s'appuie sur le rapport des députés Leroux et Olivier : un long inventaire des différentes législations dans le monde, une compilation d'études sur les conséquences de la prostitution, des statistiques internationales et françaises. Et un pays érigé en exemple : la Suède, premier pays à avoir voté la pénalisation du client. Ce rapport est plutôt fourni, mais il souffre toutefois de quelques lacunes : des pays ne sont pas étudiés (comme la Nouvelle Zélande), confusion entre corrélation statistique et causalité, presque rien sur la clientèle, très peu de place laissée aux prostituées défendant leur métier.
Malgré tout, il a conduit à la proposition de loi visant à lutter contre le système prostitutionnel, dont la pierre angulaire est la pénalisation
du client, inspirée du modèle suédois. Le rapport en fournissait une justification, et le vote aurait du se passer sans grande opposition. Mais la France reste la France, et la proposition de
loi, chatouillant l'esprit frondeur et libertaire qu'on connait aux français, a réveillé bien des passions.
Les débats au sein de la commission en charge du dossier, à l'assemblée nationale, dans la société civile, chez les prostituées, ont montré que la
proposition de loi n'allait pas de soi. Faut-il s'en étonner face au simplisme des propositions qu'elle contient, et des positions qu'elles sous-tendent ? Présenter tous les clients comme
des pervers, et toutes les prostituées comme des victimes, était au mieux le résultat d'une certaine paresse intellectuelle, au pire la traduction d'une vision doctrinaire.
Car on ne peut que regretter l'absence de mise en perspective de la prostitution dans le contexte français : que cela plaise ou déplaise à nos députés, il y a deux formes de prostitution. D'abord la prostitution imposée, qui relève de la traite des êtres humains. Ensuite la prostitution choisie, qui relève du travail sexuel.
Bien sur que non s'exclameront les plus farouches défenseurs de la pénalisation du client ! Et pourtant si. C'est écrit dans le rapport de Mme Olivier : en France, 20 à 25% des prostitués sont des indépendantes. Leur activité relève évidemment du travail sexuel, pas de la traite des êtres humains. Peu importe, pas de marchandisation des corps en France hurleront les mêmes députés clientophobes !
Et pourtant (bis), s'ils connaissaient mieux la France qu'ils sont censés représenter, ils découvriraient les différentes facettes du travail sexuel, dont la principale : la pornographie, secteur oh combien florissant, et légal. Cette activité a pourtant des usages bien pires que la prostitution : peu d'usage du préservatif, chosification de la femme, mise en scène de pratiques plutôt "exotiques", entre autres.
Une rapide recherche sur internet permettrait à nos députés de découvrir qu'un des plus gros sexshop de France, qui a pignon sur web et sur rue, revendique à lui seul plus de 5000 DVD X. Ils y découvriraient aussi des films présentant des pratiques qu'aucune prostituée n'accepterait. Des pratiques qui feraient passer 50 nuances de grey pour une bluette romantique pour adolescente pré-pubère. Un seul exemple : en France, à Paris ou ailleurs, en 2016, le quidam peut tranquillement et légalement acheter en boutique, virtuelle ou physique, des DVD de zoophilie.
Pendant qu' à l'assemblée nationale, les députés partisans de la pénalisation du client donnent des leçons sur la marchandisation du corps de la femme, l’État prélève 20% de TVA sur chacun de ces 5000 DVD vendus, par des boutiques bien françaises, inscrites au registre du commerce et des sociétés. Peu importe qu'il s'agisse de zoophilie ou d'autres pratiques bien plus dégradantes que la prostitution. Les indignations seraient-elles solubles dans la TVA ?
Car comment l’État peut justifier cela ? Au nom de la liberté de création artistique ? On attend avec impatience Mme Pellerin, ministre de la culture, venir expliquer à l'assemblée nationale qu'il s'agit juste de cinéma. Car non, ces films, où les pratiques ne sont pas simulées, ne sont pas de l'art, juste du cochon. Au nom de la liberté individuelle des acteurs et actrices ?
C'est le grand paradoxe de cette proposition de loi : elle vise à pénaliser le client, sans interdire aucunement la prostitution. Tout simplement car l'interdiction de se prostituer est rendue impossible par la jurisprudence européenne : celle-ci a au contraire affirmé à plusieurs reprises le droit des femmes et des hommes à disposer d'eux mêmes, fut-ce pour exercer un travail sexuel, pornographie ou prostitution.
La France s'apprête, en votant la pénalisation du client, à contourner cette liberté : la prostitution restera juridiquement légale, mais sera empêchée par la chasse au client. Une liberté dont on empêche l'exercice est-elle encore une liberté ? C'est l'aboutissement d'une logique liberticide, portée par des courants néo-féministes bien mal inspirés : alors que le féminisme défend la liberté et la responsabilité des femmes, le néo-féminisme veut pouvoir dire ce qui est possible ou pas. Et placer les femmes en liberté surveillée.
Étonnamment, cette liberté n'a jamais vraiment été discutée lors des débats, alors qu'elle sera une victime collatérale de la pénalisation du client. Elle n'a pas été discutée car les tenants de la pénalisation du client ont systématiquement amalgamé prostitution choisie et prostitution contrainte. La réalité, un peu plus complexe que cela, fut mise de côté au profit du dogme : tous les clients sont des coupables, toutes les prostituées sont des victimes. Dogme simpliste répété ad nauseam.
Quelques députés courageux ont tenté de questionner les motivations des clients. Ils n'ont reçu pour réponse qu'un recadrage courtois mais ferme. La doxa n'autorise pas à parler de ça. Et pourtant, parmi les clients, combien d'hommes simplement en mal de compagnie, un peu trop seuls depuis trop longtemps ? Des "sans-calins". Pas des pervers, contrairement aux acheteurs de certains DVDs "spéciaux" (mais eux ne risquent rien, l’État apprécie même leur contribution aux finances du pays).
Alors que les immigrés clandestins sont devenus des "sans-papiers", passés du statut de coupable à celui de victime, les tenants de la pénalisation s'apprêtent à faire de ces "sans-calins" des coupables. Peu importe qu'ils recourent aux services de travailleuses du sexe indépendantes. Privilège du camp du bien de désigner les coupables et les victimes.
Ce faisant, on a assisté à un numéro de minimisation assez extraordinaire : sur les plateaux télé, à la radio, dans les journaux, les zélateurs de la pénalisation n'ont eu de cesse de minimiser l'effet de leur loi. Nous cherchons juste à responsabiliser le client disent-ils. Une responsabilisation pour le moins pénible : passage au tribunal, humiliation publique par les éventuelles associations parties civiles, amende de 1500€, inscription au casier judiciaire. Et si cela ne suffit pas, stage de ré-éducation. Une responsabilisation façon Pol Pot en quelque sorte. Ou la novlangue à l’œuvre.
Orwell a prédit la puissance des mots et de leur dévoiement, au profit d'une ré-écriture du réel. On assiste à une sorte de détournement du pouvoir législatif en faveur d'une construction sociétale dont vont faire les frais les clients mais aussi les prostituées indépendantes, égratignant au passage leurs libertés individuelles. Les travailleuses du sexe indépendantes, vent debout contre cette proposition de loi, ont bien vu le danger : après les avoir empêcher de disposer d'elles-mêmes à leur guise, à quelle liberté s'attaqueront nos députés ?
De plus, le risque d'une précarisation accrue des prostituées est grand. De nombreux acteurs de la société civile et institutionnels ont alerté sur cette question. L'ONU, Amnesty International, la commission des droits de l'homme, le défenseur des droits, Médecins du monde. Tous se sont montrés défavorables à la pénalisation du client. Comme la famille Badinter, des associations d'aide aux prostituées, et même des mouvements féministes. Ce ne sont pourtant pas des prostituteurs en puissance. Mais peu importe, les députés promoteurs de la pénalisation du client restent arcboutés sur leur convictions. Nietzche disait : "les convictions sont les ennemis de la vérité". A méditer par nos députés.
On ne peut non plus passer sous silence l’ambiguïté de cette proposition de loi : alors que les clients se voient infligés une peine par la justice, rien de plus n'est prévu pour les proxénètes. Prétendre lutter contre la prostitution sans porter un minimum d'attention aux réseaux criminels organisant la traite d'êtres humains est-il bien sérieux ? Coupable renoncement de députés pour qui les proxénètes ne feraient pas partie du système prostitutionnel ?
Proxénétisme international évidemment facilité par la construction européenne. Les promesses de sécurité et de prospérité sont aujourd'hui battues en brèche, le rêve européen tourne au cauchemar. En ce sens, les deux seuls piliers de la monnaie unique et de la libre circulation ont constitué une formidable opportunité pour les réseaux mafieux. Nos politiques imaginaient-ils sérieusement que l’internationale criminelle resterait bien sagement dans ses frontières de l'époque ?
Les faiblesses de la sécurité en Europe sont apparues cruellement en 2015, surtout en France. De nouvelles lois, particulièrement intrusives, ont du être votées pour faire face à la menace terroriste. Ces lois s'appliquent aussi à la délinquance organisée. Donc au proxénétisme. Par rapport à 2013, la proposition de loi sur la prostitution s'inscrit, de fait, dans un contexte nouveau : les forces de police disposent aujourd'hui de moyens sans précédent pour traquer le crime organisé. Pourtant, certains députés continuent à vouloir pénaliser le client coute que coute.
Alors de deux choses l'une. Soit ils ne croient pas aux lois contre le terrorisme, qu'ils ont eux-mêmes voté. Auquel cas les français doivent s'attendre à de nouveaux attentats sanglants. Et de nouvelles victimes. Soit ils sont convaincus de l'efficacité des lois qu'ils ont voté et des moyens alloués à la police. Auquel cas ils démontrent le dévoiement de leur combat en une dérive liberticide visant à empêcher les femmes et les hommes de disposer d'eux-mêmes. Prémices à la création d'un ministère des bonnes mœurs et de la morale ?
Il y aurait encore beaucoup à dire sur cette proposition de loi, très critiquable sur bien des aspects. L'égalité homme/femme par exemple, citée à moult reprises par les défenseurs de la proposition de loi. Alors qu'elle est loin d'être acquise, mais pas dans le sens où on l'entend habituellement : en France, si aucun homme ne peut imposer la maternité à une femme, une femme peut imposer la paternité à un homme. L'affaire Dati/Desseigne en est la couteuse illustration (près d'un million d'euros à la charge de M. Desseigne). Ou comment transformer une juste cause en slogan vide de sens.
Malgré toutes ses faiblesses, tous ses amalgames, toutes ses atteintes aux libertés, il ne fait guère de doute que les députés voteront, comme un seul homme, la proposition de loi en l'état. Ils s'inspireront ainsi du modèle suédois, oubliant que la Suède a le triste privilège d'être le deuxième pays au monde où se produisent le plus de viols. Il donneront raison aux plus ardents défenseurs de la pénalisation, pour qui les clients sont tous, sans exception, des pervers et des coupables. Ils accepteront de donner une nouvelle définition au mot "responsabilisation" : nom féminin, consistant à passer au tribunal de police et payer une amende de 1500€. Ils oublieront le slogan d'une précédente campagne du gouvernement : mon corps, mon choix, mon droit. Si la liberté, dont celle des femmes à être des travailleuses du sexe, n'a pas de prix, ils en donneront un cout : 1500 € à la charge du client. Ils exposeront au grand jour leur surdité, refusant d'entendre et d'écouter les travailleuses et travailleurs du sexe qui ne manqueront pas de manifester lors du vote, revendiquant leur liberté à disposer d'eux-mêmes. Ils renonceront, tout à leurs contradictions, à poursuivre davantage les vrais coupables, proxénètes et mères maquerelles. Ils choisiront de pousser dans la précarité les prostituées indépendantes, qui, comme tout un chacun, ont aussi des factures à payer. Ils entérineront le caractère respectueux et absolument pas dégradant de la pornographie (accessoirement très utile aux finances publiques).
Et ce sera une grande victoire. Une victoire à la Pyrrhus
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par exemple :
M de Sourcessure 2 février 12:40
Toujours la même confusion :
etc ... 48 commentaires
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