Artiste de la passion, qu’il représenta avec tous les excès dus à ce sentiment, de manière violente, perverse, éruptive, volcanique, « hystérique » . Cela lui fut reproché, cela lui fut aussi bien compté.
Il a été un "migrant" de luxe !
Fils d'une Nation éternellement déchirée et dépecée, l’après-guerre réserve au jeune garçon un sort plus enviable, puisqu’il alterne les séjours entre la Pologne et la France, au point de passer son bac dans notre pays et de se former au cinéma à l’Idhec, ainsi qu’en philosophie à la Sorbonne. En Pologne il travaille avec l’un des grands maîtres du cinéma, Andrzej Wajda, comme assistant sur plusieurs films.
Une version vénéneuse du ménage à trois
Jeune homme doué et désireux de rattaper le temps perdu de la guerre, Zulawski est également critique de cinéma et écrivain. Ses premiers ennuis avec la censure commencent avec ses deux premières réalisations, Troisième partie de la nuit (1971) et Le Diable (1972). Les deux films entremêlent déjà violemment une situation d’aliénation politique : la Pologne occupée quasiment depuis toujours par des puissances étrangères qui la convoitent de façon permanente ( Prusse, Russie, Allemagne Nazie)
Et, comme cette situation "mumbo jumbo" n'est pas réglée, il choisit à Paris. Où il connaît la consécration avec "L’important c’est d’aimer" (1975).
Puis, dans La Nuit américaine. Romy Schneider en actrice tourmentée, Jacques Dutronc en mari mélancolique et faible, Fabio Testi en amant photographe et manipulateur, feront grande impression sur les spectateurs dans cette version vénéneuse et mélancolique du ménage à trois, d’ailleurs interdite aux moins de dix-huit ans.
Zulawski à Berlin, ville-frontière entre les deux blocs de la guerre froide, il tourne Possession (1981), Isabelle Adjani dans le rôle principal ; divorce, collision du réalisme et du fantastique, de l’intime et du politique Possession fait vivre à l'écran les monstres d’un totalitarisme qui embrasse tous les domaines de l’activité humaine, du théâtre intime à la scène politique. Acteurs chauffés à blanc, vision exacerbée des affects, plongée brutale et malaisante dans les abymes de l’inconscient, sortie hallucinée de soi : Possession serait l’idéal thématique de son auteur.
Comment s’aimer sans se détruire ?
Déjà la vie, avec l'usure et le vieillissement, prend le temps pour nous faire disparaître, mais l'amour est une consommation si l'on peut dire ...
Ce thème est illustré par la vie propre du couple qu'il forme avec Sophie Marceau et qui s'achève aves leur séparation.
Les films suivants en reconduisent de fait la problématique et les obsessions. La Femme publique (1984), L’Amour braque (1985), Mes nuits sont plus belles que vos jours (1989) tournent ainsi autour de la même douleur (comment s’aimer sans se détruire ?)
Une fusion des sentiments citoyens et de la passion amoureuse
[Quand on vit, quand on parle, quand on écrit et réalise au cinéma, on a tous quelque chose du pays où l'on vit..et de son traitement des citoyens...
Nous, en France, ça pourrait aller, mais que serait un film syrien, iraquien, lybien, camerounais, etc... ]
Pour les deux derniers titres l’œuvre d’Andrzej Zulawski a transposé sur le terrain de l’intimité amoureuse quelque chose du tragique et pathétique destin polonais. C’est bien ce pays morcelé, aliéné, persécuté, désintégré, et aspirant d’autant plus furieusement à son intégrité, que n’aura cessé d’habiter le cinéaste, en le projetant sur la toile sous la forme convulsive de la possession sentimentale.
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