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on peut être difficilement plus fiable et plus complet que Le Monde  et  "Oscar Wilde le déchu" c'est le titre que Le Monde a choisi Afficher l'image d'origine

  LE MONDE | 30.07.2003 à 12h25    

   Condamné aux travaux forcés le 25 avril 1895  pour "outrage aux mœurs", c'est à dire homosexualité          

                           

Les sujets britanniques ne sont pas foule à Naples, en ce début de février 1898. Aussi les deux jeunes maîtres d'école attablés devant leurs cafés ne sont-ils pas surpris lorsqu'un inconnu, les ayant entendus bavarder, demande la permission de se joindreà eux. L'immense silhouette un peu molle, les yeux tombants, le souriremi-ironique mi-amer leur rappelle vaguement quelque chose ; le gentleman a manifestement connu des jours meilleurs, mais il est encore élégant dans son manteau à col de velours, un rien trop ajusté. Parapluie au bras, chapeau melon à la main, il les salue de tout son mètre quatre-vingt-dix, se cale sur une chaise avec aisance et commence à parler

De quoi ? Peu importe. Ils tombent aussitôt sous le charme de cette voix profonde aux inflexions raffinées, à la diction parfaite, où l'humour le dispute à l'esprit pour faire oublier une érudition sans limites. Pendant une heure, peut-être deux, il parle et cela leur suffit. Oscar Wilde a toujours affirmé que "le premier devoir dans la vie est  d'adopter une pose". Il continue envers et contre tout. Prêt à mourir pour un bon mot. Quelques semaines auparavant, Alfred Douglas, l'homme à qui il a sacrifié sa vie, l'a laissé tomber après avoir mangé sa maigre pension, "l'expérience la plus amère d'une vie amère", a-t-il dit, en confiant à un ami qu'il avait songé au suicide. "Avez-vous pu imaginer passer à Naples toute votre vie après la vie ?", a demandé l'ami. "Non, la cuisine est vraiment trop mauvaise !", a-t-il répondu en riant.

Ce jour de février, il n'a même plus une chemise à se mettre - un domestique a profité de son désarroi pour lui dérober le peu qui lui restait, y compris sa précieuse garde-robe. Mais qui s'en apercevrait ? Il boit, il parle. Les deux jeunes Anglais, éblouis, ne voient pas les consommations qui défilent, la note qui s'alourdit. Elle les fera grimacer tout à l'heure, quand le brillant causeur prendra congé en leur laissant l'addition. Ils ne lui en voudront pas. Au contraire, M. Greene racontera mille fois à son fils Graham sa mésaventure napolitaine : "Songez combien il devait se sentir seul pour consacrer tant de temps et  d'esprit à un couple d'instituteurs en vacances !" Après tout, notera Graham Greene, "Wilde payait son verre avec[ l'esprit ] la seule monnaie qu'il eût". A Naples, il peut encore faire illusion. Pas pour longtemps.

Derrière le masque du poète se dissimule un homme brisé, cassé, ruiné, un paria trop célèbre. Il n'a que 43 ans, mais les deux années de travaux forcés qu'il vient de purger comptent pour vingt. Condamné le 25 avril 1895 pour "outrage aux mœurs" (c'est-à-dire homosexualité, le plus honteux des crimes à l'époque), il a tout perdu en huit semaines, passant brutalement du statut de star internationale à celui de monstre, quelque part "entre Gilles de Rais et le marquis de Sade", soupire-t-il.

Fortune, relations, famille, il n'a plus rien sauf la célébrité, désormais plus pesante qu'un boulet. "Il me semble parfois avoir démontré qu'entre la célébrité et l'infamie il n'y a qu'un pas, et peut-être moins. (...) On me reconnaîtra où que j'aille et l'on connaîtra ma vie, dans ses folies tout au moins", a-t-il écrit pendant son incarcération, dans une bouleversante confession, "De profundis".

Désormais, il n'a même plus la ressource de l'écriture. Après la prison, il lui restait juste assez de force pour écrire La Ballade de la geôle de Reading, plaidoyer contre la peine de mort et l'abomination de la vie carcérale. Puis plus rien. Entre Naples et Paris, la Suisse et de nouveau Paris, il croise parfois d'anciens amis qui changent de trottoir pour ne pas avoir à le saluer. Un jour, il rencontre André Gide, très gêné, et le tape de quelques francs ; cette fois, il ne "paiera son verre" que d'une phrase poignante : "Il ne faut pas en  vouloir à quelqu'un qui a été frappé." Epuisé, tari, il n'attend plus que la mort, qui le rattrapera en 1900, à 46 ans, dans un petit hôtel de la Rive gauche.

Irlandais superstitieux, Oscar Wilde a toujours été hanté par le sentiment de la fatalité. Elle court en filigrane à travers toutes ses œuvres, même les plus légères. Comme s'il avait pressenti que son destin n'était pas la comédie mais le drame. Un jour, un devin lui a prédit la gloire, suivie du désastre. Il l'a cru. Au point de s'y abandonner, spectateur de sa propre déchéance. A lire ses derniers écrits, les questions se pressent en foule. N'en déplaise à la légende qui en fera un martyr, Wilde n'est pas la victime expiatoire d'une société coincée ni un militant homosexuel poursuivi pour ses idées. Il ne le prétendra jamais. La société victorienne, impitoyable mais hypocrite, tolérait tous les écarts, à condition qu'ils restent cachés.

"Pas vu, pas puni",* telle était sa devise. Wilde savait parfaitement jusqu'où il pouvait aller. Dans ses livres, l'homosexualité reste allusive - les juges abandonneront d'ailleurs ce volet de l'affaire - et, en public, il se gardait bien d'étaler une vie privée fort agitée.

Tombé pour une passion aveugle pour un petit con de noble (NDLR)

S'il est victime, c'est d'abord de lui-même, de sa "faiblesse", dit-il, de son aveuglement, et surtout de la passion destructrice qu'il a nourrie pour un monstre à visage d'ange, Lord Alfred Douglas, dit "Bosie" ("petit garçon"), le mauvais génie dont l'allure d'éternel adolescent évoque de façon troublante le héros maléfique du portrait de Dorian Gray, pourtant écrit un an avant sa rencontre en 1891, alors que tout souriait à Wilde, parvenu à l'apogée de son succès.

La vie d'Oscar Wilde se divise en deux phases : avant et après "Bosie". Avant, il y a la réussite trop facile d'un homme gâté.

Après, la décadence qui aboutira à la catastrophe. Avant, c'est d'abord une enfance de rêve, en Irlande, entre des parents séduisants et un peu fantasques. Le père est un don Juan qui élève ensemble ses enfants légitimes et ses bâtards, aussi bon médecin que piètre gestionnaire - il ne laissera qu'un maigre héritage. La mère est une poétesse nationaliste exaltée, petite nièce de Charles Mathurin, l'auteur de Melmoth, qui, comme son second fils se lève à midi, fuit le soleil et affectionne les tenues bariolées, romanesques. Oscar se révèle vite un surdoué des études littéraires, bien qu'il affiche un détachement de bon goût - on prétend qu'il travaille la nuit.

Il brille au Trinity College de Dublin, où il décoche une médaille d'or - qu'il vendra pour survivre à Paris. Il brillera plus encore à Oxford, où, après avoir travaillé ses humanités, sa "pose" et sa diction, il se mue en parfait dandy. Major de sa promotion, il épate ses comparses par ses culottes de velours, ses bas de soie, son snobisme et son amour immodéré des lys, qu'il dispose dans des vases de chine bleue. Conquis par l'esthétisme, il se fait le chantre de "l'art pour l'art", et clame à qui veut l'entendre qu'il "fera de sa vie un chef-d'œuvre".

IL y réussit fort bien, de façon surprenante. A peine sorti d'Oxford, sans fortune et sans profession avouée, sans avoir rien produit sinon quelques critiques, des poèmes ronflants et des pièces injouables, il devient immensément célèbre. La presse comme la haute société louent ses réparties, ses extravagances, son impertinence et son humour. Partout, on le copie, on le cite, on se l'arrache. Après Londres et Paris, où il fraye avec l'intelligentsia (Verlaine, Mallarmé, Gide, Degas, Monet, etc.), il conquiert les Etats-Unis au cours d'une tournée de conférences. Coqueluche des salons, il n'exerce son talent de conteur qu'en bonne compagnie et consacre le plus clair de son temps à dénicher le dernier tailleur ou le décorateur à la mode.

Pourtant il persiste à vouloir devenir écrivain. Et, là encore, il réussira au-delà de toute espérance avec un roman (Dorian Gray), des contes et des pièces comiques, comme L'Eventail de Lady Windermere - qui n'a jamais quitté l'affiche depuis sa création.

Derrière l'apparente futilité, Oscar Wilde est un homme complexe, sensible et généreux, tiraillé par des aspirations contradictoires. Il a adhéré à la franc-maçonnerie tout en flirtant avec l'Eglise romaine, balancera longtemps entre l'éthique et l'esthétisme, court les actrices mais bée devant la statuaire grecque. S'il apprécie la plastique masculine, il n'en demeure pas moins parfaitement conventionnel dans ses choix : après de longues fiançailles avec le plus beau parti d'Irlande, il épouse à 30 ans Constance Lloyd, aussi riche et discrète qu'il est dépensier et flamboyant. Ce n'est pas une union de façade, la preuve est qu'il lui fait deux enfants en deux ans. Mais il se lasse vite de ce rôle de "bourgeois malgré lui" que raille le peintre Whistler. Deux ans après son mariage, il découvre l'homosexualité, par curiosité semble-t-il, en succombant aux avances de Robert Ross, dit "Robbie", un jeune étudiant qui deviendra son plus fidèle ami.

Ce qui n'est encore qu'une expérience discrètement contenue dans les limites de la bienséance prendra un tout autre tour lorsque le flâneur de génie, devenu auteur à succès, croisera le chemin de Lord Alfred Douglas, en 1891. Paresseux mais violent comme son père, le marquis de Queensberry, dit "Bosie", grand amateur de boxe, incapable de maîtriser  ses pulsions ni ses colères, capricieux, prodigue de l'argent des autres, a tous les défauts. Mais il est beau et s'entiche d'Oscar Wilde, lequel, d'abord simplement flatté par l'admiration du jeune Lord, succombe à son tour. Là, tout bascule. Sa réputation, ses relations, la prudence, la raison, Wilde oublie tout, sacrifie tout pour Douglas. Il suit le jeune dépravé dans les bas-fonds de Londres, règle ses dettes et ses démêlés sordides avec les prostitués. Il écrit des lettres passionnées que l'autre égare, et il tombe entre les pattes des maîtres chanteurs. "C'était comme déjeûner avec des panthères", écrira-t-il. Subjugué, incapable de rompre, il s'enlise toujours plus. "Ce que le paradoxe était dans la sphère des idées, la perversité le devenait dans la sphère de la passion."

Entre autres vices, "Bosie" hait son père, l'insulte, le nargue. Le marquis, en retour, s'acharne. Traumatisé par le suicide de son fils aîné, lui aussi impliqué dans une sombre affaire d'homosexualité avec un ministre en vue, il s'en prend à Wilde plutôt qu'à son cadet afin de protéger le nom. Tiraillé entre les deux, l'écrivain finit par         prendre la décision la plus absurde de son existence. Le 28 février 1895, le marquis a déposé à son club une carte adressée à "Oscar Wilde qui pose au somdomite (sic)". Deux jours plus tard, poussé par "Bosie" qui ne se tient plus, Wilde va au commissariat déposer  une plainte en diffamation puis, toujours sur les instances de son amant, part à Monte-Carlo, négligeant de préparer le procès. La débâcle est inévitable. Mal conseillé, Wilde prend les choses à la légère, plaisante et indispose le jury alors que le marquis a engagé des détectives, soudoyé dix témoins, bref mis tout en jeu pour le confondre. Le 5 avril, Queensberry est acquitté sous les applaudissements. Dans les heures qui suivent, son avocat convainc le procureur d'engager une nouvelle procédure contre l'écrivain, sur la base des témoignages recueillis. De plaignant, Wilde est devenu accusé.

Un journaliste le prévient qu'un mandat d'amener a été lancé, il a encore le temps de traverser la Manche, comme "Robbie", "Bosie" et la plupart de ses amis - on se bousculera à Douvres, cette nuit-là. Lui reste pourtant. Il est arrêté en fin de soirée et aussitôt incarcéré.

Pourquoi ? Fatalisme, inconscience, fascination de la tragédie, ici, les biographes bredouillent. D'autant qu'une seconde occasion lui sera offerte un mois plus tard, lorsqu'il obtiendra une mise en liberté sous caution en attendant d'être définitivement jugé. Un ami lui propose son yacht. A ce stade, il ne peut plus ignorer le piège, mais il refuse encore de fuir : "Je veux purger ma peine"...

Rares sont les hommes qui sont tombés, comme lui, "d'une sorte d'éternité de gloire" dans "une sorte d'éternité d'infamie". Encore plus rares ceux qui ont analysé et admis leurs erreurs avec une telle sincérité. Oscar Wilde adorait les paradoxes, le moindre n'est pas que cet apôtre de la frivolité ait dû toucher le fond pour produire son vrai chef-d'œuvre. De profundis, ce long monologue de 150 pages, est, écrira Albert Camus, "l'un des plus beaux livres qui soient nés de la souffrance d'un homme". Car le dandy, découvrant la douleur, comprend qu'il s'est trompé non seulement sur la vie mais sur l'art et, reniant tout ce qu'il a été, devient enfin profond. "Mon erreur, avoue-t-il, fut de me confinerexclusivement aux arbres de ce qui me semblait le côté ensoleillé du jardin et de fuir l'autre côté à cause de ses ombres et de son obscurité." Et il ajoute cette phrase, qui revient en ritournelle : "Le vice suprême est la superficialité. Tout ce dont on prend conscience est bien."

Véronique Maurus


En savoir plus

 

1854 : le 16 octobre, Oscar Fingal O'Flahertie Wills Wilde naît à Dublin, deuxième fils de Sir William Wilde, chirurgien célèbre.

1871-1878 : il suit des études classiques à Trinity College, Dublin, puis à Magdalen College, Oxford, où il remporte tous les premiers prix.

1876 : Oscar voyage en Italie , en Grèce et s'installe à Londres, où il devient un personnage très en vue, esthète et homme d'esprit.

1882 : il parcourt les Etats-Unis pour une tournée de conférences.

1884 : il se marie avec Constance Lloyd, dont il a deux fils, Cyril en 1885 et Vyvyan en 1886. En 1886, il a une première relation homosexuelle avec Robert Ross.

1890 : il publie Le Portrait de Dorian Gray, qui obtient un énorme succès, de même que les pièces qui suivirent : L'Eventail de Lady Windermere, Une femme sans importance, Un mari idéal et L'Importance d'être constant.

1891 : il rencontre Lord Alfred Douglas, fils cadet du marquis de Queensberry, qui l'entraîne dans les milieux de la prostitution masculine.

1895 : il engage un procès en diffamation contre le père de Douglas, qui l'a accusé de sodomie, et le perd. Il est aussitôt poursuivi, incarcéré et condamné à deux ans de travaux forcés pour délit d'homosexualité.

1896-1897 : en prison, Oscar écrit une longue confession sous forme d'une lettre à Douglas, qui sera publiée après sa mort par Robert Ross, sous le titre  De profundis.

1898 : après un séjour en Normandie, où il écrit La Ballade de la geôle de Reading, Wilde rejoint Douglas à Naples. Celui-ci l'abandonne, une fois ses dernières ressources épuisées.

1900 : le 30 novembre, Oscar Wilde meurt d'une méningite à l'Hôtel d'Alsace, rue des Beaux-Arts, à Paris. Il est enterré à Bagneux et ses restes seront transférés en 1908 au cimetière du Père-Lachaise.

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NDLR :             LES ANGLAIS DE L'ESTABLISHMENT D'AUJOURD'HUI SONT DE LA MEME MATIERE  :  L'ORDURE  (LORD DURE) 

    "*Pas vu, pas puni",ce fut aussi la devise des "invisibles" des années qui ont suivi 1900, en France aussi, tant que l'homosexualité n'a pas été dépénalisée..et largement au-delà...(aujourd'hui les couples homos se tiennent excessivement rarement par la main)

 

Par LE MONDE - Publié dans : CULTURE GAY & SOCIETES - Communauté : Cavaillon communauté gay bi trans lesbienne sur la région
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