Partager l'article ! ADAM & ADAM ou TANT QU'IL Y AURA DES HOMMES / Une nouvelle sensas' de Yves ... le glacier fond, la montagne éclate: Tout le mon ...
Puis, avec quelque chose de louvoyant dans l'expression :
Catastrophe atomique ? on ne sait pas...La nuit étendait son voile sinistre sur la pauvre masure dans laquelle croupissaient les deux survivants. Bientôt, elle ensevelit tout et ne laissa plus des silhouettes qui étaient là que des ombres indistinctes.
Les ombres s’endormirent...
Pendant les trois jours suivants, Servan n'eut pas un mot, pas un regard, pas une expression propre à trahir
son secret. Jason ne s'étonnait pas peu de ce comportement entre cuir et chair, mais paraissait devoir lui décerner la moindre importance qui répertorie les lubies d'un godelureau dont les
rouages et les ressorts lui étaient devenus familiers.
Cela fit qu'il baissa la garde.
Baisser la garde, c'est-à-dire ne plus entourer son déshabillage du soir du luxe de précautions qui lui servait jusque-là de garde-fou.
Servan était à l'affût et attendait le gibier. Quand venait l'heure de dormir, il écoutait, toutes oreilles en exergue, les bruits caractéristiques
du bienfait qu'on se dispense sous sa couverture. Seulement, il n'était pas exclu que Jason, rendu circonspect une attitude devenue brusquement trop singulière pour être inoffensive, redoublât de
discrétion et expédiât son affaire sans se dénoncer. Servan imagina alors un coup de partie qui lui mettrait dans les mains la clef des agissements de celui qu'il se proposait de confondre : dès
que le silence s'établissait dans la cabane, il changeait de position, intervertissait tête et pieds et observait, grâce à l'accoutumance à la pénombre, bien à l'abri du coin du meuble qui
dérobait son camarade et qui faisait là comme un promontoire derrière lequel il était aisé d'établir une surveillance assidue.
Voir sans être vu, c'est l'art suprême de tout espionnage.
La veille et l'avant-veille, rien ne s'était passé. Raison de plus pour insister.
Au soir du troisième jour, Servan sentit son coeur s'emballer. Le lent bruissement d'une main qui s'agite sous le tissu venait de rompre le silence
du cabanon. Il éprouva alors un de ces vertiges qui égarent même le flegme le plus rassis. Mais l'instant n'était pas aux états d'âme, il s'agissait avant tout de se commettre à l'événement. Avec
un aplomb dont il ne se serait jamais cru capable, il se souleva sur ses mains paumes à plat, s'agenouilla et, sans laisser le temps à la réflexion de contrarier son projet, exécuta une reptation
vers la couche de Jason.
Ce dernier n'avait évidemment pas prévu pareille ingérence : tout à coup, une voix toute proche susurra, d'une manière particulièrement onctueuse
:
Jason, surpris, mais encore plus affolé, eut une réaction instinctive facilement prévisible :
Jason avait tenté de reculer, mais l'autre le serrait à la botte.
L'agressé essaya de se libérer, de ruer, d'échapper à l'étreinte qui lui était imposée. En vain : Servan le tenait ferme et à présent lui causait de fort près, tout son corps plaqué contre le sien.
Jason haletait, tentant de desserrer l'étau de son camarade dont la force, supérieure à la sienne, le réduisait totalement à sa merci.
Brusquement, Servan retira d'un coup la couverture. Jason prétendit repousser ce nouvel assaut, mais l'autre s'amalgamait à lui de toute la
vaillance d'un désir rendu plus attrayant par la résistance qu'il y rencontrait.
La résistance tomba. Servan entendit ces paroles, prononcées sur un ton pitoyable, tant elles trahissaient la reddition acceptée sans combattre
:
En disant cela, il avait glissé une main entre son ventre et celui de Jason. Ce dernier sentit qu'on lui empoignait le sexe.
L'ennuyeux, pour quelqu’un qui proteste de sa normalité, c'est que le contact d'un pair est censé éteindre toute disposition favorable. Or, ainsi
que l'avait prophétisé Servan, l'ustensile qu'il palpait réalisait l'exacte antithèse de la cacochymie et semblait au contraire apprécier les douceurs qu'on lui prodiguait.
Jason ne répondit pas. Brusquement, Servan s'assit sur lui, rectifia la posture en génuflexion et dirigea la longue barre rigide là où les garçons
écrivent le dernier mot de leurs ébats.
Jason, certes humilié, mais plus en conscience qu'en faits, n'opposa plus rien au coulissement de sa vigueur dans la gaine. Pendant quelques
secondes, Servan imprima le mouvement de va et vient qui conditionne l'avancée vers le dénouement inéluctable de cette osmose.
Il advint que l'agent accorda son initiative au diapason du patient. D'abord timides, ses impulsions acquirent de plus en plus d'indépendance, il se
mit à soupirer, puis à geindre, tête renversée en arrière, tandis que son bassin réglait la mesure de son ascension vers la félicité.
En ce moment, Servan le souleva aux épaules, l'attira à lui par un jeu de balancement et dit :
La notation d'intention de cette parole s'éclaircit lorsque Servan prit lui-même l'initiative de la réintroduction. Une longue période commença
alors, épicée de tous les vertiges d'un désir désormais impossible à désavouer. Jason, inondé de sueur, poussait de brefs geignements qui attestaient sans l'ombre d'un doute que ce qu'il faisait
n'appartenait plus à son domaine de répulsion, s'il lui avait jamais appartenu.
Soudain, les geignements s'accentuèrent, le mouvement s'interrompit, devint erratique, un petit sanglot troua le silence de la cabane, une rosée
brûlante inonda les entrailles de Servan. Jason, ébahi par la puissance du dégorgement et l'intensité de l'éclair qui l'accompagnait, multipliait les convulsions et ne consentait pas à se
retirer.
Quand la source fut tarie, il s'affaissa sur le lit comme un enfant et se mit à sangloter.
Quelques secondes s'écoulèrent, muettes et immobiles. Servan murmura, avec une douceur pleine d'émotion :
Jason hésita à répondre. Il finit par bredouiller :
Un nouveau silence succéda à cette espèce de sentence. Servan, assis au pied du lit, contemplait la nudité de ce garçon qui avait tant brillé par
l'écorce d'une pudibonderie de raccroc ; l'écorce une fois exfoliée, que montrait-il ? Le tuf. Du reste, Servan n'insista pas ; il savait qu'à prolonger cette espèce de monologue, il risquait
d'aggraver l'embarras de son camarade et par-là de détruire tout ce qu'il venait de conquérir.
Il allait rejoindre son lit, quand il se ravisa :
Toutes les réponses de Jason se faisaient rares et entrecoupées. En conscience, Servan le remerciait de l'immense effort qu'il consentait sur lui-même. N'avait-il pas cédé à un attrait que probablement il ne cessait de combattre depuis qu'il avait mesuré l'empire qu'il exerçait sur lui et qu’il exercerait encore davantage s'il avait le malheur de s'y livrer ? Ce n'est pas autrement que nous détestons, parfois jusqu'au meurtre, ce que nous sommes. Qui sait si Hitler n'avait pas des ascendances juives ?
Jason se coucha sans ajouter mot. Servan fit de même et se mit à songer.
Son propre désir n'avait pas survécu à la scène qui venait de se dérouler. Celui de Jason avait été le sien, au-delà de tout. Il ne rêvait plus que
de reprendre dans ses bras cet être si compliqué, si confronté à toute la variété des conformismes délétères et des idées bifurquées que véhicule un certain milieu social. A un moment, il revint
auprès de lui sur la pointe des pieds. Jason s'était endormi d'une seule masse. Servan lui arrangea la couverture, fut au point de l'embrasser mais y renonça. Il se recoucha avec au fond du coeur
l'inexprimable sentiment d'avoir franchi le seuil du temple au-delà duquel le récipiendaire d'un nouveau culte découvre que le diable qu'on lui avait peint sur la muraille est en réalité le
gardien du jardin d'Eden.
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Les lendemains de fête, les noceurs ont la tête lourde. Les lendemains de trahison, les sycophantes ont la
conscience accablée. Or, dans l'esprit de Jason, c'était bien une trahison qu'il avait perpétrée, la pire de toutes, celle que l'on commet contre soi-même. Dès son réveil il en mesura l'énormité.
Il ouvrit les yeux avec l'impression physique d'être sale. Il se dit à part soi : ce n'est pas possible…
Il n'osa ni se lever, ni même remuer. Il était la proie d'un de ces désordres intérieurs où rien n'est cohérent, où l'amplitude des visions que l'on
subit prend un aspect déformant, où le dégoût et le remord s'entrecroisent et se chevauchent dans un inexprimable chaos.
Un remuement du côté du lit de Servan acheva de l'affoler. Avec une hâte presque fébrile, il se tourna sur le flanc et enfouit sa tête sous la
couverture. Il devina l'ombre de son camarade qui s'approchait de lui. Une voix chaleureuse et tendre, pour lui la voix du diable, lui murmura :
Jason eut à peine la force de répondre :
L'autre dut peser dans son jugement le respect de la dignité bafouée, car il ne répliqua rien tout de suite. Au bout d'un moment, toutefois, il souffla, du bout des lèvres :
Quoi, avait été prononcé sur ce ton lamentable qui tire la diphtongue en longueur et prête à la note une courbe ascendante. Servan reprit :
Jusqu'ici, Jason ne s'était pas départi de sa posture lovée qui ne laissait voir à son interlocuteur que ses cheveux, tout le reste étant à l'abri des draps. Variante du syndrome de l'autruche dans lequel nous nous sommes tous réfugiés au moins une fois au cours de notre vie. Tout à coup, il fit un demi-tour complet sur lui-même, fixa son camarade au fond des prunelles et s'exclama :
La réaction de Servan le désarma intégralement, en ce qu'au lieu de se condouloir avec lui, il se mit à rire :
Une brutale interruption enraya net sa phrase :
Jason se prit la tête entre les mains et dit sur un ton si désolé :
Il était clair que Jason venait de tendre lui-même le filet dans lequel il se prenait. Comme les arguments lui manquaient, l'autre poursuivit sur son élan :
Un ange passa sur cette espèce d'allégorie. Jason en éprouva-t-il le cuir ? Toujours est-il qu'il ne pipa mot, plongé dans une espèce de réflexion
abattue qui ne consentait pas à passer carrière.
Il fallait une voie de dégagement à ce huis clos étouffant. Ce fut Servan qui l'indiqua :
Comme Jason ne bougeait pas, son camarade employa une rhétorique énergique :
Un pieux silence succéda à cette joute oratoire. Jason, assis sur le bord de sa couche, regardait alternativement le sol et Servan. Ce dernier vint contre lui et lui coula son bras autour de l'épaule. L'autre ne protesta pas :
On ignore si l'énoncé de Servan était d'une pertinence à emporter la balance ; ce qui est indubitable, c'est qu'une demi-heure plus tard, ce fut
bien ensemble que tous deux se présentèrent à la baignoire.
L'attitude de Jason avait évolué. Le petit sermon qu'il avait recueilli malgré lui n'était pas sans avoir introduit dans son cerveau toutes sortes
d'interrogations qui y prenaient relief avec une singulière profondeur. Il lui arriva même, tandis qu'on se savonnait abondamment, de s'exclamer en riant à demi :
Il reprit, sur un ton mi-partie philosophe et résigné :
En cet instant, Jason le dévisagea d'une drôle de manière. Le petit sourire qui décorait son visage était d'un genre à préparer une controverse un peu gênante, sans doute, mais finalement pas tant que ça. Soudain, il dit, entre l'ironie et l'embarras :
Là, Servan ne put se retenir de s'esclaffer :
L'enfilade de questions qui venait de s'émanciper du gosier d'un garçon pourtant sur ses gardes d'une récidive, était de celles qui font dire
qu'elles tiennent en réserve bien des arrière-plans obscurs. On est face à face, nus, à se parler de choses plutôt téméraires, et voilà que cette situation s'éternise, et que le parti censé le
plus rétif à son développement agit comme s'il avait résolu de signer avec lui sinon pacte d’alliance, du moins suspension d’armes. Cette idée de Jason cherchant le moins maladroitement à se
dédouaner d'un attrait pour la chose qu'il était supposé exécrer ne quitta plus Servan. Il croyait voir danser au-dessus de lui une bacchanale de diantres obscènes nouvellement désignés à
l'annonce officielle de sa promotion au rang des bougres.
Jason, cependant, avait fini son lavage et se séchait. Servan se fit la réflexion qu'il prenait bien son temps pour quelqu’un dont l'unique souhait
était de rompre au plus vite avec une ambiance peut-être de nouveau fatale à sa vertu, déjà si écornée la veille.
En cet instant, un violent coup de chaleur lui électrisa les nerfs.
Devant lui, alors qu'il venait d'achever l'essuyage des jambes, Jason s'était légèrement détourné.
Une légère tuméfaction avait dilaté un organe qui, en bonne et droite conscience, n'aurait jamais dû se départir de sa station
cochléaire.
Rien de vraiment ostensible, sans doute, mais le volume du rondouillet fuseau s'était incontestablement épaissi.
Cela se confirma encore lorsque, ayant ramassé ses affaires sur la berge, il s'avisa de se pencher en avant. Comme il était de profil, Servan eut
toute latitude d'apprécier le progrès que décrivait l'émoi sur sa personne.
Pour ramasser sa serviette, il plia de nouveau le tronc, mais cette fois-ci en tournant le dos à son compagnon. Sa corolle se dégagea du fond de
désir qu'éveillait l'écartement de ses fesses.
Servan était sur les braises. Cette inconcevable duplicité, doublée d'une palinodie aussi brutale qu'imprévue, le déconcertait. Que prétendait-il
prouver ? Qu'une simple argumentation scolastique était de taille à tuer une conviction héritée de seize ans d'éducation rigoriste ? Qu'il suffisait d'une oraison plus ou moins bien débitée pour
anéantir des années de certitudes fondées sur un précepte prétendument inaliénable ?
Il fit un pas dans sa direction. Il avait devant lui la suprême tentation, le monstre de luxure qui tentait de l'affriander après avoir tant craché
dans la soupe, et le monstre semblait lui dire : qu'est-ce tu attends ?
Impossible de résister. Si en ce moment Jason se fût déjugé, Servan l'aurait violé, tout bonnement. Il contemplait le corps qui avait l'air de
palpiter. Il parvint ainsi à moins d'un mètre de lui. Ce dernier dut le deviner dans son dos, car un imperceptible frémissement le parcourut tout entier.
Leur volupté avait été pleine, entière, au-delà de toute expression. La tête leur tournait, ils chancelaient. Il fallut s'asseoir. Ils demeurèrent
ainsi de longues minutes, silencieux et marmoréens, regardant vaguement devant eux le gave rouler des eaux tumultueuses.
Le soir vint, chacun se coucha sans rien dire.
Au matin, ils s'éveillèrent presque en même temps. Servan s'accouda, vaguement inquiet. Il entendit bientôt un murmure lui souffler :
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écouter -pour l'ambiance- Charles Trenet lui-même : Mes jeunes années
https://www.youtube.com/watch?v=eB7HI2n0MgY
commentaire : cavaillongay dégotte les perles sur le net
Un peu précieux le Yves, mais il est ainsi prouvé que des gens d'un haut niveau linguistique ne se sentent pas déroger en venant ici, avec nous ! ("nounours")
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