Le blog gay de Cavaillon et ses amis prostitués
Sa mère Andrée voulait une fille, et ainsi, pour être aimé de sa mère, en vain, le petit Maurice désirera toujours être une fille, lui aussi. D'ailleurs, dès sa petite enfance, il scandalisera sa nounou en tenant à tout prix à « pisser assis ». C'est au fait que sa mère ne voulait pas de garçon, que Sachs – qui plus tard subira une analyse – attribue sa honte d'exister, le mépris qu'il portera toujours à sa propre personne et aussi son homosexualité.
juif, homosexuel, voleur, collabo, hystérique, génial, alcoolique, désespéréun témoignage des Années folles, des Années noires. Les années 20, 30, 40 – et tous les héros de ce temps. C’est un auteur "autofictif", un "autobiographe", . Un personnage, une étrange figure qui hante La Place de l’Etoile
Ecrivain maudit, "juif collabo", auteur scandaleux, Maurice Sachs laisse une œuvre protéiforme, dont deux récits à la première personne bouleversants de vérité et d’intelligence. Au début du XXIème siècle, on vient de lui consacrer un Cahier de L’Herne. Sa voix ne s'éteint pas.
Maurice Sachs • Crédits : Editions de L'Herne
Au début, Maurice rencontre Cocteau comme Rimbaud rencontra Verlaine :
Maurice a dix-sept ans lorsqu'il rencontre le poète. C'est un Cocteau de trente-cinq ans, fumeur d'opium et veuve inconsolable de Radiguet qui lui ouvre les bras. Dans ces années-là, on verra Sachs aimer, vénérer, idolâtrer Cocteau comme son dieu, son modèle, son maître. C'est d'ailleurs sur les pas de Cocteau, alors ramené à Dieu par Jacques Maritain, que Sachs se fera séminariste et même prêtre
Né Maurice Ettinghausen à Paris, le jeune Sachs (du nom de sa mère) fréquente les pensionnats anglais puis, très vite, Le Bœuf sur le toit, ce lieu inventé par Cocteau où défile toute l’avant-garde de 1925. Maurice Sachs est un mondain, un futur écrivain, un séducteur, un amoureux des garçons, un voleur, un tricheur, un voyageur, un alcoolique, un homme tenté par le mysticisme (il se convertit au catholicisme avant de renoncer).
Maurice Sachs aura mille vies. Ami de Max Jacob, des Maritain, des Castaing, en affaires avec Chanel, brouillé avec Cocteau, sous la protection de Gide, Sachs traverse l’Atlantique, se fait conférencier aux Etats-Unis, se marie, abandonne sa femme, vivote sans le sou avec un jeune Californien à Paris, siège au comité de lecture de la NRF, et il écrit, il écrit, il écrit sans cesse, souvent, quand il peut... il rêve de devenir un écrivain. Ce ne sont que quelques péripéties.
Il rencontre Violette Leduc et l'incite à écrire. Il adopte un enfant juif qu’il abandonne. C’est la guerre, il n’a plus un sou, il revient à Paris, pendant l’Occupation et fait du trafic. Ce n’est pas très clair, mais il mène la grande vie à Paris, vit quai Conti, au 15 exactement : dans cet appartement où grandira, plus tard, le jeune Patrick Modiano. Et puis Maurice part en Allemagne, désargenté, il est traqué, il se fait grutier.
Un juif au cœur de la machine nazie. Il trahit, espionne pour les Allemands, protège ceux qui lui plaisent. Il est arrêté, mis à l’écart, les Alliés bombardent Hambourg. Sa prison est évacuée, il marche sur une route d’Allemagne. On lui tire une balle dans la tête. Il s’écroule. La légende, le mythe de Maurice Sachs viennent de commencer.
On le retrouvera plus tard, après la Libération, après la guerre. On dit qu’il aurait survécu, qu’il serait revenu, qu’il se serait enfui, sur un autre continent, qu’il aurait changé d’identité. Ses livres, magnifiques, paraissent alors : Le Sabbat, La Chasse à Courre (avant-guerre, il n’avait que peu publié).
C’est une voix unique, un témoignage des Années folles, des Années noires. Les années 20, 30, 40 – et tous les héros de ce temps. C’est un auteur "autofictif", un "autobiographe", juif, homosexuel, voleur, collabo, hystérique, génial, alcoolique, désespéré. Un personnage, une étrange figure qui hante La Place de l’Etoile, le premier livre de Patrick Modiano.